Les mécanismes de solidarité nationale ont été conçus dans un contexte de forte croissance. Sécurité sociale, assurance chômage, retraites, minima sociaux : comment réinventer ces mécanismes dans une société sans croissance ? Quelques pistes dans cet article repris par l’excellent BastaMag! L’occasion de jeter également un oeil sur un article illustrant à merveille comment la sortie du productivisme peut créer de la richesse et de l’emploi…
par Aurélien Boutaud
Un article publié le 13 juin 2014 par Basta! (extrait repris du dossier réalisé pour S!lence, n°423, mai 2014)
Les principaux mécanismes de solidarité nationale, hérités des trente glorieuses, ont été conçus dans un contexte de forte croissance. Sécurité sociale, assurance chômage, retraites, minima sociaux : comment réinventer ces mécanismes dans une société sans croissance ? Quelles formes de solidarité sont possibles ? Et comment faire en sorte que la décroissance ne soit pas synonyme de mise à mort de l’État-providence ?
Depuis quarante ans, les questions du travail et de l’emploi ont été assez largement abordées par les penseurs de l’écologie politique et de la décroissance. Mais une autre question importante en matière de solidarité reste posée : comment financer les systèmes de protection sociale hérités des trente glorieuses dans une économie sans croissance ? Assurance chômage, retraites par répartition, sécurité sociale, minima sociaux : Cyrille Di Méo et Jean-Marie Harribey [1] se demandent ce « que deviendraient ces solidarités institutionnalisées, obtenues par les luttes sociales, dans une société de décroissance démonétarisée ? »
On touche là un sujet sensible. Car l’obsession de nos dirigeants pour la croissance n’est pas seulement idéologique, elle est aussi pratique, notamment en termes de prélèvements sociaux. En effet, si l’activité économique s’accroît, alors on assiste en théorie à une augmentation proportionnelle des moyens alloués aux mécanismes de solidarité. La croissance a là encore des vertus quasiment magiques : si la masse monétaire augmente, alors les prélèvements opérés sur cette masse s’accroissent également, et ce sans avoir besoin d’augmenter les taux d’imposition. Alors que les attaques libérales se multiplient pour réduire les taux de prélèvement, comment imaginer maintenir ces systèmes de solidarité dans une société sans croissance, dans un contexte où la base d’imposition serait, en plus, amenée à se contracter ?